Désormais considéré comme un organe à part entière, le microbiote intestinal représente l’ensemble des quelques milliards de micro-organismes qui tapissent naturellement les parois de l’intestin. En cas de perturbations de cet écosystème bien rodé, votre organisme s’expose à diverses problématiques, allant du simple inconfort jusqu’à des désagréments sévères. Depuis une dizaine d’années, la communauté scientifique a réellement pris conscience de l’importance du microbiote. Les multiples recherches en cours nous apprennent progressivement qu’il possède un rôle fondamental dans notre santé.
La bonne nouvelle, c’est qu’on sait mettre au point de quoi le repeupler en cas d’appauvrissement ou de lésions, grâce aux probiotiques. Prendre soin de son microbiote représente une démarche essentielle au bon fonctionnement de l’organisme.
Qu’est-ce que le microbiote ?
De quoi est composé le microbiote intestinal ?
Il faut imaginer le microbiote comme un monde de microscopiques petits êtres vivants.
On le situe souvent au niveau intestinal. C’est tout à fait exact : 90% de notre microbiote s’y trouve, avec une concentration particulièrement importante au niveau du côlon. Cependant, ces micro-organismes se retrouvent également ailleurs, dans une moindre proportion, et forment d’autres microbiotes (nez/bouche/pharynx, peau, poumons, vagin).
Le microbiote représente 10000 à 100000 milliards de bactéries, virus, parasites, champignons… qui cohabitent. C’est plus que la totalité des cellules de notre propre corps ! Plus de 160 espèces de bactéries différentes ont été identifiées à ce jour. La composition du microbiote est très complexe et chaque individu en possède un qui ne sera pas le même que celui du voisin !
Comment se met-il en place ?
Le microbiote intestinal se forme dès la naissance et la mère aurait un rôle déterminant dans la mise en place de celui du foetus qu’elle porte(1). La constitution du microbiote est exponentielle entre la naissance et les 3 premières années de la vie. À l’âge adulte, sa composition est relativement stable et son poids varie autour de 2 kg. Autrement dit, il peut peser plus lourd que notre cerveau !
Toutefois, cet écosystème se régule et se montre modulable sous l’influence de facteurs extérieurs. Les paramètres qui l’influencent sont nombreux : alimentation, âge, environnement (pollution), médicaments (antibiotiques en tête). Certains additifs et pesticides présents dans notre alimentation semblent pouvoir perturber de manière préoccupante la composition et le fonctionnement du microbiote.
Quels sont les rôles principaux du microbiote ?
Le microbiote possède plusieurs rôles dont certains se révèlent fondamentaux pour le bon fonctionnement de notre corps.
Aide à la digestion
En premier lieu, le microbiote participe à la digestion en assimilant les fibres alimentaires, qui sont des sucres complexes, grâce à son équipement en enzymes spécifiques (et que les enzymes intestinales ne sont pas en capacité de traiter).
La dégradation de ces fibres conduit à la production d’acides gras à chaîne courte (acétate, butyrate et propionate en majorité). Ces acides gras représentent un substrat énergétique utilisé par les cellules qui tapissent la paroi du côlon.
Mais le microbiote fermente et dégrade également d’autres nutriments résiduels issus de notre alimentation.
Participation au métabolisme
Le microbiote participe à la synthèse de plusieurs variétés nutritionnelles indispensables à notre métabolisme :
- la vitamine K ;
- certaines vitamines du groupe B (B9, B12).
D’autre part, il module l’absorption des sucres et des lipides. Il est estimé que 10% de notre énergie quotidienne est fournie par notre microbiote.
Développement et fonctionnement du système immunitaire
La muqueuse intestinale a le double rôle d’absorber efficacement les nutriments (perméabilité), mais sert également de bouclier face à l’invasion de certaines substances indésirables (barrière).
Le microbiote soutient les fonctions de cette muqueuse dans laquelle il prend place. En occupant une place non négligeable, il protège l’organisme des intrusions d’éléments pathogènes qui transitent par les intestins.
Par ailleurs, le microbiote favorise le développement de l’immunité et prépare l’organisme à lutter contre les infections et certaines maladies. Environ 70% de notre système immunitaire est concentré dans l’intestin. Les interrelations avec les différents composants de l’ensemble de ce système sont extrêmement riches et complexes.
Relation avec le cerveau
Le microbiote est parfois appelé « 2e cerveau ». Initialement, cette appellation tient au fait que l’intestin contient un réseau de neurones très développé (2e organe le plus riche en neurones après le cerveau). En réalité, même si l’affirmation semble être imagée de prime abord, il existe un dialogue direct entre le cerveau et notre intestin. Par exemple, le microbiote joue un rôle majeur dans les différents aspects de notre comportement alimentaire(2). Les résultats d’une étude très récente montrent que certains neurones de l’hypothalamus détectent des variations de l’activité bactérienne intestinale et cela a pour impact d’adapter l’appétit (3).
Ainsi, c’est au niveau de notre intestin que se contrôlerait la notion de satiété, c’est-à-dire le message nous indiquant la sensation de ventre plein. De même, des indicateurs pourraient être envoyés de la part du microbiote pour donner une envie particulière de gras ou de sucre, par exemple.
D’autre part, les preuves avancent dans le sens d’un rôle du microbiote dans la gestion du stress, de l’impact sur nos émotions et notre humeur.
1. Milani C, Duranti S, Bottacini F, Casey E, Turroni F, Mahony J, et al. The First Microbial Colonizers of the Human Gut: Composition, Activities, and Health Implications of the Infant Gut Microbiota. Microbiol Mol Biol Rev MMBR. déc 2017;81(4):e00036-17.
2. Van de Wouw M, Schellekens H, Dinan TG, Cryan JF. Microbiota-Gut-Brain Axis: Modulator of Host Metabolism and Appetite. J Nutr. mai 2017;147(5):72745.
3. Gabanyi I, Lepousez G, Wheeler R, Vieites-Prado A, Nissant A, Wagner S, et al. Bacterial sensing via neuronal Nod2 regulates appetite and body temperature. Science. 15 avr 2022;376(6590):eabj3986.